Au-delà des neurones : une nouvelle approche pour comprendre la dépression
Les recherches menées par Caroline Ménard et son équipe indiquent que la dépression est un problème lié à l'ensemble du corps, qui nécessite une approche globale pour comprendre toute sa complexité. Alors que la plupart des traitements traditionnels de la dépression ciblent principalement les neurones, les travaux de cette équipe ont démontré que l'inflammation – la réponse naturelle du corps à la maladie, aux blessures ou aux agents nocifs – affecte non seulement des régions spécifiques du cerveau associées à la dépression, mais aussi divers types de cellules, en plus des neurones.
En tentant de mieux comprendre le stress, l'équipe de Caroline Ménard a découvert que son impact va bien au-delà du cerveau: il influence la barrière hémato-encéphalique, le système immunitaire, la barrière intestinale et le microbiome. Ces avancées ont permis d’identifier de nouveaux biomarqueurs liés à la vulnérabilité aux maladies et à la résilience au stress, qui pourraient constituer des signaux d’alerte précoce pour certaines maladies mentales. L’équipe a également découvert des différences biologiques clés entre les sexes.
Vers une médecine de précision
Ces découvertes confirment l’hypothèse de plus en plus répandue selon laquelle la dépression se manifeste différemment chez chaque individu. Alors que 30 % à 50 % des personnes touchées par la dépression dans le monde ne répondent pas aux traitements conventionnels, il est urgent de concevoir des approches plus adaptées et personnalisées. La maladie mentale reste une préoccupation critique dans les communautés nordiques, où quatre Nunavummiut sur dix présentent des symptômes dépressifs cliniquement significatifs (Muckle et al., 2020). Le recours à des traitements personnalisés est une avenue particulièrement prometteuse pour cette population, qui fait face à des facteurs de stress uniques – tels que des changements socioéconomiques, environnementaux et culturels – qui peuvent avoir un fort impact sur leur santé globale.
Les percées réalisées par Caroline Ménard et son équipe sont une étape cruciale vers la détection de la susceptibilité aux maladies mentales et le suivi des réponses aux traitements. En misant sur la médecine de précision – une approche de traitement personnalisé en fonction des caractéristiques individuelles – l’équipe développe une méthode plus efficace pour traiter les troubles psychiatriques, incluant la dépression. Cette stratégie innovante prend en compte la composition biologique unique de chaque patient, et ouvre la voie à des interventions plus ciblées et plus efficaces.

« Il peut y avoir des biomarqueurs spécifiques pour les hommes et pour les femmes, des schémas distinctifs pour différentes populations, et même selon le type de trouble de l'humeur.»
- Caroline Ménard, professeure, département de de psychiatrie et neurosciences, Université Laval